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CONTRE L’OPÉRATIQUE
AGAINST OPERATICS

Author(s): Hervé Coutau-Bégarie
Subject(s): Security and defense, Military policy, Geopolitics, Peace and Conflict Studies
Published by: Carol I National Defence University Publishing House
Keywords: Operarics; War; Technique;

Summary/Abstract: Au commencement était la tactique. Lorsque l’art de la guerre s’est véritablement transformé en science, au début de l’époque moderne, avec la substitution de la discipline militaire à l’héroïsme chevaleresque, le souci dominant était celui des ordres, des formations, en vue des combats. C’est cette discipline nouvelle qui s’est appelée tactique, par reprise d’un vocable grec transmis par les quelques auteurs anciens qui avaient survécu. Au XVIIIe siècle, cet art de la guerre devient plus complexe, du fait des progrès des armements et de la croissance des effectifs qui oblige à marcher divisés pour combattre réunis; le maniement de masses de plus en plus nombreuses exige une science des marches et des mouvements, ainsi qu’une conception d’ensemble plus subtile, dont la théorisation est esquissée dès les premières décennies du XVIIIe siècle. Le maréchal de Saxe parle, dans ses Rêveries, des „grandes parties de la guerre”, Napoléon des “hautes parties de la guerre”, Jomini et les auteurs du début du XIXe siècle imposeront un mot réinventé, dans Ies années 1770, par un auteur français aujourd’hui quelque peu oublié, Paul-Gédéon Joly de Maizeroy: la stratégie. L’art et la science de l a g u e r re s ’ a r t i c u l e ro n t d é s o r m a i s a u t o u r d u d i p t y q u e stratégie/tactique. Jomini avait suggéré une ligne de séparation simple qui sera reprise par la plupart des auteurs du XIXe siécle et de la première moitié du XXe siècle: stratégie avant et après le combat, tactique pendant le combat. La littérature stratégique étant pragmatique, ce critère contestable avait l’avantage décisif de la simplicité. En outre, il s’accordait parfaitement à l’environnement de l’époque, dominé par le modèle napoléonien centré (à tort ou a raison, ce n’est pas le problème) sur la recherche de la bataille décisive censée régler d’un coup le sort d’une campagne. Telle était la vulgate, c’est-à-dire ce qu’ont retenu la plupart des lecteurs et des praticiens. Les observateurs les plus avisés se doutaient bien que les choses n’étaient pas aussi simples. Jomini lui-même n’avait-il pas distingué des opérations mixtes, relevant à la fois de la tactique et de la stratégie? Dès les années 1820, le général Lamarque introduisait la notion, assez floue, de “bataille stratégique“ réunissant en un même ensemble plusieurs batailles ou combats livrés en des lieux ou des jours diffé, mais s’inscrivant dans une même séquence opérationnelle. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que la théorie s’est sérieusement attaquée à la question. Les auteurs allemands, après 1870, se sont mis à parler d’opérations. Cette idée va cheminer à travers les écrits d’un certain nombre de penseurs dont le recensement reste à faire. Il pourrait réserver quelques surprises: ainsi, alors que l’histoire de la pensée militaire, jusque dans ses travaux les plus récents, semble considérer que cette idée d’opérations est l’apanage des auteurs allemands et russes de la fin du XIXe siècle et du début du xxe siècle, on trouve une définition très nette et tout à fait moderne de la différence entre rupture tactique et rupture stratégique chez le général espagnol Eicardo Burguete, don le line La ciencia de la guerra est paru en 1917 c’est-à-dire une décennie avant les grands travaux des théoriciens soviétiques auxquels on attribue aujourd’hui le crédit de cette découverte.

  • Issue Year: 2006
  • Issue No: 20
  • Page Range: 16-18
  • Page Count: 3
  • Language: French